Mémoires de porc-épic / Alain Mabanckou

Mémoires de porc-épic / Alain Mabanckou

Mémoires de porc-épic . Alain Mabanckou

Nom d’un porc-épic ! Qu’il est beau ce roman d’Alain Mabanckou. Il recevait d’ailleurs le prestigieux  prix Renaudot en 2006.

De quoi parle ce roman, quel est ce porc-épic qui nous tient en haleine ?

Oui car en effet, c’est bien un porc-épic qui parle dans ce texte !   Un porc-épic qui a peur de mourir à la suite de son maitre… Il s’adresse à un baobab…

Ce porc-épic raconte comment il est devenu le double nuisible du jeune Kibandi après son initiation par le père de ce dernier.  À la suite de cette initiation, le jeune Kibandi peut se dédoubler. Il possède un autre lui-même. Le porc-épic est son double animal. Il est censé le protéger et le servir en toutes situations… Il faut dire que cette initiation a été faite contre le gré de l’enfant.

Papa  Kibandi avait aussi son double nuisible : un rat. Il s’en servait pour tuer ses ennemis. Devant les nombreuses morts dans le village les habitants soupçonnaient Papa Kibandi de posséder quelque chose.  Mais il  toujours su détourner les soupçons. Mais on rencontre toujours plus fort que soi. C’est ainsi que le célèbre sorcier Tembé Essouka indique aux villageois où se cache le rat, double nuisible de papa Kibandi. Ce rat est tué aussitôt papa Kibandi meurt…

Kibandi et sa mère s’exilent dans un autre village. Il grandit, apprend le métier de charpentier dans lequel  il excelle. Sa mère vient à mourir. C’est le déclic.

Kibandi, comme le faisait son père commencera à utiliser son double animal c’est-à-dire le porc épic pour éliminer tous ceux qui s’opposent à lui. Il faut dire que son double humain, son autre lui-même a besoin de  manger ces victimes pour vivre.

Dès lors tous les prétextes sont bons pour tuer.  Le porc-épic  se considère comme un simple instrument, dégageant ainsi toute responsabilité dans ces meurtres. Pourtant dans la plupart des cas, il donne raison à son maitre : « pour qu’un être humain en mange un autre il faut des raisons concrètes, la jalousie, la colère, le manque du respect, je te jure que nous n’avons en aucun cas mangé quelqu’un pour le plaisir de la manger ».

Les raisons de tuer ces personnes sont plus ou moins justifiables pour le porc-épic. Ainsi la belle  Loumouamou est mangée parce qu’elle a refusé d’épouser Kibandi.

L’intellectuel Amédée est mangé parce qu’ « il critiquait à haute voix le comportement des personnes âgées, il les traitait de vieux cons, d’ignorants, d’idiots ». Et tout ça parce « qu’  il a beaucoup lu et qu’il avait fait de longues études  et qu’il avait été dans les pays où il neige » !

Je me demande bien si Alain Mabanckou s’identifie à Amédée, lui le Congolais parti étudier en France…

Au baobab silencieux, notre porc-épic dans un style hilarant raconte dans les détails ses missions. Les morts se multiplient, des soupçons pèsent contre Kibandi.  Il réussit pourtant  à déjouer le fameux rite du cadavre qui déniche son malfaiteur.

Cette association de malfaiteurs atteint le nombre de 99 personnes tuées. La dernière victime étant un nourrisson dont le père devait de l’argent à Kibandi.

Kibandi qui ne peut plus s’empêcher de tuer afin de nourrir son autre lui-même, décide de s’attaquer à deux jumeaux qui venaient de s’installer  dans le village avec leurs parents. Ce sera sa perte. On sait qu’en Afrique, les jumeaux sont considérés comme sacrés, ce sont des êtres dotés de pouvoir. Les piquants du porc-épic  sont sans effet contre ces jumeaux.  Avec l’aide du nourrisson revenu se venger, ils mettent hors d’état de nuire Kibandi.  Ils permettent quand même au porc-épic de s’échapper.

Si on peut avoir une mauvaise impression de cet homme qui tue sans regret, il faut se rappeler aussi que c’est son père qui lui a transmis  ce pouvoir maléfique. Pour le bien du village, Kibandi meurt sans enfant. Il n’a donc transmis  le pouvoir à personne.

Par ailleurs, le récit  du porc-épic est comme une confession. En acte d’expiation, il veut utiliser son pouvoir pour lutter contre les doubles nuisibles de la région.

Le roman est écrit d’une seule traite sans la moindre ponctuation à part la virgule.   On y retrouve un porc-épic qui connait bien les hommes. Il parle d’eux sans complexe ; comme ici par exemple : « j’ai appris des hommes le sens de la digression, ils ne vont jamais droit au but, ouvrent des parenthèses qu’ils oublient de refermer ».

C’est un porc-épic humain qui parle. Il a les même peurs, les mêmes espérances, qu’un homme.  Ce qui fera dire à l’Escargot entêté en annexe du roman : «  Et depuis, je ne regarde plus les animaux avec les mêmes yeux. D’ailleurs, qui de l’Homme ou de l’animal est vraiment une bête ? Vaste question ! »

Mémoires de porc-épic est un roman africain. Il rend hommage aux contes mais aussi aux croyances et mythes africains. Il parle du double humain , de la sorcellerie. C’est aussi un traité sur l’Homme et le mal.

Un beau livre qui vous touche et laisse des traces comme des piquants de porc-épic !

Si vous l’avez lu, laissez-moi vos avis dans les commentaires. Nom d’un porc-épic ! Ca  m’intéresse ! Partagez aussi cet article à vos amis !

2 réflexions sur “Mémoires de porc-épic / Alain Mabanckou

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