Le mandat est le sixième livre de Ousmane Sembene. Il parait en 1956.
L’action se déroule dans un quartier de Dakar. Ibrahima Dieng est un chef de famille pauvre et au chômage qui vit ou plutôt survit grâce à des emprunts. La misère est d’ailleurs la chose la mieux partagée par les habitants de son quartier !
Ainsi quand il reçoit un mandat de son neveu travaillant en France, c’est l’espoir qui renait dans toute sa famille. Et pas seulement.
Tous les habitants du quartier voient désormais en lui un sauveur. Certains sollicitent de lui un prêt, d’autres demandent quelques kilos de riz… Alors qu’il n’a pas encore reçu l’argent !
(Mandat : titre constatant la remise d’une somme à l’Administration des Postes par un expéditeur avec mandat de la verser à une personne désignée).
Pourtant, la lettre qui accompagne le mandat précise : « Ce mandat de 25000FCFA, je te l’envoie. Garde-moi les 20 000 francs. Tu donneras 3000 francs à ma mère et tu prendras 2 000 francs pour toi. Je sais que tu ne travailles pas ».
La somme qui revient à Dieng est donc très modique mais elle lui permettra au moins de faire manger sa famille quelques jours; n attendant la prochaine faveur d’Allah… Car il faut le dire, dans sa misère, Ibrahima Dieng est resté un homme de foi.
Il se rend donc au bureau des postes pour retirer le montant…Mais cela s’avère impossible car il ne possède pas de pièce d’identité. L’analphabète qu’il est ne sait même pas ce que c’est.
-« Eloigne –toi d’ici tonna l’employé. Ibrahima Dieng, tu me donnes ta carte d’identité ou non ?
-Homme, je n’ai pas de carte répondit Dieng d’un ton chevrotant.
-Va la chercher.
-Où ? ».
Il se décide finalement à se faire établir la fameuse carte d’identité. Ce sera l’occasion pour lui de se confronter à une Administration inefficace et corrompue.
Déçu, et dans l’urgence, il signe une procuration à une connaissance pour retirer le mandat…
Ce n’était peut-être pas une bonne idée… (Si vous voyez ce que je veux dire…)
Cette malheureuse expérience de Dieng va bouleverser l’homme droit qu’il a toujours été. L’honnêteté est un délit, conclura t-il indigné. Seule la fourberie paye !
Le mandat, une satire de la société contemporaine en Afrique.
Je connaissais Sembene Ousmane seulement à travers son excellent roman Les bouts de bois de Dieu, longtemps inscrit au programme scolaire béninois. L’action de déroule à l’époque coloniale. Les ouvriers du chemin de fer soutenus par la population se révoltent contre l’Administration coloniale.
Le mandat par contre se déroule après les indépendances. L’Administration est maintenant aux mains de fonctionnaires autochtones.
Pourtant faces aux maux qui minent cette Administration : corruption, incivisme, manque de conscience professionnelle, les citoyens restent résignés… J’ai trouvé cela un peu paradoxal.
En tous cas, cinq décennies ans après sa publication le Mandat de Sembene Ousmane demeure d’actualité.
Satyrique, Le mandat est une fresque de la société africaine aux lendemains des indépendances.
C’est un récit très marquant, écrit avec beaucoup d’humour et d’ironie.
Le livre dénonce la misère, le chômage, les tares de l’Administration publique. Mais il prône des valeurs comme l’amour, la fidélité, la générosité, la solidarité.Ces valeurs constituent la force du petit peuple.
***
J’ai aimé chaque page de ce récit qui ne fait que 77 pages. Si vous ne l’avez pas encore lu, je vous le recommande fortement. Si vous l’avez déjà lu, dites-moi ce que vous en pensez.
Ma note pour ce livre : 5/5.
Le Mandat est précédé de Vehi Ciosane mais je n’ai pas lu cette histoire là. Le début ne me plaisait pas trop. Et vous, l’avez vous lu ? De n’ à lire moi aussi ?
Désiré Godonou
Ok
J’aimeJ’aime