Amours sonnantes et trébuchantes de Eustache Prudencio.

Amours sonnantes et trébuchantes de Eustache Prudencio.

IMG_20180712_091716_3

Amours sonnantes et trébuchantes est un recueil de dix nouvelles, écrit par l’écrivain béninois – qu’il repose en paix – Eustache Prudencio.

Ce sont des récits plus ou moins courts, profondément ancrés dans le vécu béninois.

Le style est limpide et un brin recherché et malgré les drames qui sont relatés, il y a toujours dans chaque nouvelle une pincée d’humour.

J’ai décidé de vous présenter cinq nouvelles.

« Amours sonnantes et trébuchantes » est la première nouvelle.

Quand Madame Agosthina da Silva va accueillir à l’aéroport, sa fille Génia, qui a passé les quatre années en France, elle n’a aucun gène à se faire accompagner de son amant El Hadj Usman Yoro, un riche commerçant de la ville.

El Hadj Usman est très prévenant envers la famille. Et voici, Génia tombe amoureux de l’amante de sa mère, et en devient même enceinte et doit l’épouser.

C’est la foudre qui s’abat sur dame Agosthina car le sieur était l’unique soutien financier de sa mère après la mort de son mari.

C’étaient donc des amours sonnantes et trébuchantes, c’est-à-dire basées sur l’amour qu’elle entretenait avec El Hadj Usman Yoro.

Scandale au foyer !

« Le mortier rouge« .

Wossilatou vit modestement avec son mari Inoussa. Ils ont deux enfants. Elle est vendeuse de galettes et son mari « fonctionnaire moyen » à la sous-préfecture.

Malgré les faibles revenus, le foyer se porte bien. Ils s’aiment et ne se plaignent pas à haute voix comme dirait un de mes professeurs à l’université.

Mais la vie de Wossilatou bascule quand Sikiratou, une de ses anciennes camarades d’enfance revient au village pour les funérailles de sa mère.

Sikiratou respire le luxe et organise pour sa défunte mère des obsèques fastueuses.

Il n’en faut pas plus pour déclencher l’envie de Wossilatou. Justement, son amie n’est pas égocentrique. Elle propose de partager avec elle, le secret de sa réussite.

Seule condition : tomber enceinte et aller la rejoindre à Bassagri, au Nigéria. La fortune est assurée.

Ainsi, dès que Wossilatou s’aperçoit qu’elle était enceinte, elle invente une histoire à faire dormir accroupi et quitte son mari. Elle rejoint sa bienfaitrice.

Neuf mois, plus tard, elle accouche. C’est seulement à ce moment que Sikiratou lui révèle l’horrible vérité : pour devenir riche, il faudra qu’elle sacrifie son fils ; l’enfant qui vient de naitre….

« Notre accoucheur est un grand féticheur. Il te préparera un savon spécial qui sera le produit de cette poudre noire et du corps de ton bébé que tu devras piler de tes propres mains dans ce mortier… Après quoi, la fortune illuminera ta vie. » p36

Jusqu’où Wossilatou est-elle prête à aller pour devenir riche ?

« J’y suis, j’y reste« .

C’’est la grève générale au pays. Toutes les administrations sont fermées et sans service minimum.

Le peuple est dans les rues et réclame la démission du Président de la république.

Son excellence ne voit pas les choses de cette façon. Ni la foule qui arrive au palais et lui jette des pierres au visage, ni la première dame, ni le secrétaire général du parti n’arrivent à le convaincre de céder le pouvoir.

« J’y suis j’y reste »

Le président a à cœur les avantages et privilèges de son poste. Il se sert alors de la force. Des balles réelles sont tirées sur les manifestants faisant des dizaines de morts.

Il faudra l’intervention de l’armée pour déloger le président qui s’en va certes mais avec un parachute doré.

« Allo une triste nouvelle« .

Un beau matin, en fait, un vilain matin, le téléphone sonne, obligeant monsieur Adéchokan à interrompre sa grasse matinée habituelle.

Son interlocuteur lui apprend que son fils Ayorindé est décédé…. à Londres !

Il ne savait même pas le cher papa que son fils avait voyagé. Celui-ci avait déménagé quelques mois plutôt, arguant qu’il ne supportait plus le contrôle parental.

Rapidement, il réalise qu’il est le seul à ne pas être informé de ce voyage en terre européenne. Sa femme et ses autres enfants étaient au courant mais ne lui ont rien dit.

Le drame est survenu. Plaintes lamentations.

Les préparatifs se font pour rapatrier le corps et procéder aux obsèques. On invite un charlatan pour consulter les dieux….

Et si tout ceci n’était qu’un canular ?

« La vermine« .

Al Hadja Wossilatou est une commerçante béninoise. Elle fait des affaires avec le Nigéria et les liasses de Nairas s’entassent chez elle, tant sa fortune est grande.

Elle est riche certes mais comme c’est souvent le cas, avare. Une vraie Harpagonne !

Ses affaires, sa fortune surtout est mise à mal quand le gouvernement Nigérian décide de fermer les frontières pour contrôler le flux du Nairas. Face aux contrefaçons le gouvernement a mis en circulation de nouveaux billets.

Elle se retrouve alors avec une forte somme de Nairas sous les bras. Comment faire pour échanger ses billets ? Dans un premier temps, elle se fait voler cinq millions par un charlatan qui lui a promis « de se rendre invisible pour introduire l’argent au Nigéria et l’échanger contre de nouvelles coupures ».

Une fois, les cinq millions pris, l’imposteur prend ma clé des champs !

Mais dame Wossilatou parvient à trouver le moyen de recevoir de nouvelles coupures.

Elle entame dès lors un commerce illicite avec le Nigéria en important les produits de contrebande.


Mon avis

Ce qui rend intéressant ce recueil aujourd’hui , c’est le contexte de rédaction des récits. Ils furent écrits pendant que le Bénin était sous le fameux programme d’ajustement structurel.

La misère est ambiante. C’est aussi l’époque des coups d’État en Afrique .L’auteur nous fait vivre cette époque.

L’auteur a été ambassadeur du Bénin au Nigeria. Et la plupart des récits se déroule entre les deux pays.

La culture africaine est omniprésente notamment au plan cultuel.Il est question de guérisseurs, de charlatans, ces personnes sont souvent présentées sous un mauvais jour.

Les histoires contenues dans ce livre sont bien souvent tristes. Mais l’auteur en parle avec un ton léger, qui pousse très souvent au sourire.

Le livre est très riche et enrichissant sur un plan sémantique.

Vous allez passer un bon moment de lecture !

Désiré Godonou.

2 réflexions sur “Amours sonnantes et trébuchantes de Eustache Prudencio.

  1. Une œuvre tel un miroir, ceux qui liront ces écrits comme moi, se verront, retrouveront leur passé, leur présent et leur futur.
    Cette œuvre est en effet toutes les sensations, tous les souvenirs, tous les sentiments que peut contenir une existence certaine humaine naissant sur une table et aboutissant à la mort. Ce recueil chante par la plume de l’auteur une aurore de gaieté.

    Poète Roland EDAH

    J’aime

Donner votre avis éclairé sur cette sauce :

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s